Madame Hofmann, Sébastien Lifshitz : De la force tranquille.

L’histoire : une année dans la vie de madame Hofmann, infirmière en chef à l’hôpital nord de Marseille, dans un service de cancérologie (oncologie), alors qu’elle s’apprête à partir en retraite après 40 ans de service.

C’est un documentaire sur le mystère d’une femme banale, qui a su côtoyer au quotidien la mort pendant 40 ans (des urgences à la cancérologie), alors qu’aujourd’hui, une infirmière ne reste que 7 ans dans un hôpital. Le film épouse l’équilibre qu’elle a su trouver, entre son travail et ses respirations (les pauses café, sa mère, son compagnon et la montagne).

Les difficultés liées au COVID (problématique des cercueils plombés pour les enterrements à l’étranger) sont effleurées, et les problèmes de personnel sont soulignés (usure, problème de recrutement), mais ancré du côté de la vie, le film tente constamment de deviner ce qui fait tenir le système et des êtres parfois à bout de souffle, et tentés par l’ennui du privé sur un matelas de billets.

On n’y voit peu la maladie à laquelle on s’attend, car on voit très peu de patients de l’hôpital, et un seul mort, dans son sarcophage de plastique blanc (le montage laisse penser qu’il s’agit de l’individu aperçu sur un brancard un peu avant, mais il n’en est rien). Si on voit très peu de malades de l’hôpital, la maladie est omniprésente, mais plutôt du coté de la soignante (au bord du burn out, avec des prédispositions génétiques à certains cancers) et de ses soutiens (sa mère et son compagnon ont des soucis de santé), ce qui dessine un corps soignant malade, aussi bien symboliquement (manque d’attrait, autorité non reconnue par certains malades, comme évoqué en début de film) que physiquement, et c’est bien l’épuisement qui mène Sylvie Hofmann à la retraite.

Dans ce désert de souffrances qu’est l’univers hospitalier, un des rares points d’eau est l’humour, et Sébastien Lifshitz s’y attarde, tant ce rire a ceci de particulier qu’il se nourrit, pour en guérir, de la mort, avec cette apothéose, en fin de film, où le départ en retraite manque de se transformer en Orange mécanique.

En résumé : un bon film sur la banalité du bien, son mystère et sa fragilité, mais aussi sa transmission, de mère à fille, de partante à remplaçante. Sans voyeurisme ni noirceur, avec santé, le film nous rappelle que notre ordinaire est parfois extraordinaire, et que le système ne tient qu’à un fil.

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